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modération de ses rapports qui l’ont fait surnommer « l’Anacréon de la guillotine », tandis que Camille Desmoulins l’appelait, à cause de ses malversations, « ce vieux sac de Barrère », au lieu de « Barrère de Vieuzac ». La députation des Hautes-Pyrénées comprenait, en outre, Dupont (de Lux}, Brice Gertoux, notaire à Campan, Lacrampe (d’Argelès), enfin Féraud, qui fut assassiné par une folle, Aspasie Carlemigelli, laquelle, l’ayant entendu nommer, l’avait pris pour Fréron, le chef de cette « jeunesse dorée », qui devait tenir si fièrement tête aux révolutionnaires.

Lorsqu’il se présenta aux suffrages du collège électoral de Lourdes, Picqué ne prit pas la qualité de médecin, mais bien celle de « cultivateur, électeur du canton de Lourdes ». Il avait ses raisons pour cela : ses compatriotes n’avaient jamais eu confiance dans ses mérites médicaux. C’est ce qu’il nous apprend lui-même à la page 171 de son manuscrit, et il nous en donne les raisons dans les termes suivants :

« En absorbant mes très petites ressources et portant un dégoût mortel sur un travail qui se prêtait aux plus urgents besoins, les médicastres, plus près que moi des trompettes d’une misérable renommée, le maudit procès, les persécutions nobiliaires, la haine des prêtres m’avaient laissé une indignation profonde. Elle s’étendait sur la bourgeoisie, repère de noblesse jalouse, présomptueuse, ignorante, ridicule… » « Obligé de répondre à des duellistes avec le cœur le plus aimant, se trouvant dans une continuelle agitation, entouré d’ennemis nombreux, vaincus, perfides, astucieux, sans prévoir un terme à une situation aussi désagréable », il avait, en outre, à compter avec sa mère qui « gouvernait la maison en souveraine », et avec la nécessité de vivre, à laquelle « une rigoureuse économie n’apportait, il s’en fallait bien, aucun soulagement à ses maux ». Longtemps « l’amour avait été sa seule et grande affaire » ; mais, ajoute-t-il (p. 158), « tout consolateur qu’il est des maux de cette triste vie, il n’appartient peut-être qu’aux heureux d’aimer longtemps ». Et on le voit souvent changer de maîtresse, jusqu’à jouer un rôle peu honorable auprès du duc