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l’histoire contemporaine.

l’arrêté pris en 1818, ni qu’on doive détruire aujourd’hui l’institution créée à cette époque et que quarante années de pratique ont enracinée. Chaque temps a ses nécessités, chaque siècle a son caractère !…[1]. »

Je pense inutile de revenir ici sur une question que M. Cournot considérait déjà comme vidée ; on ne refuse plus guère à l’histoire une place à part dans l’instruction de la jeunesse. Mais remarquons dès à présent que la dernière des objections ci-dessus reproduites acquiert une force particulière quand il s’agit de l’histoire d’hier. Beaucoup d’écoliers certainement, trop de professeurs peut-être, sont fort disposés par eux-mêmes à quitter les sanctuaires de la science sereine pour l’arène brûlante des discussions politiques ; que sera-ce s’ils y sont non seulement autorisés, mais encouragés et comme invités par les programmes ?

Aussi, lorsque M. Duruy, en qui je louerai plus volontiers l’infatigable écrivain et l’homme désintéressé que le ministre trop actif, — Dieu nous garde des administrateurs et des législateurs trop actifs ! — introduisit dans les lycées l’étude de l’histoire contemporaine, beaucoup d’historiens furent les premiers à protester, tout bas, il est vrai, car il eût été peu sûr de protester tout haut. Voir omettre des programmes du baccalauréat l’histoire de l’Antiquité, celle du Moyen-âge, celle même des temps modernes jusqu’à Louis xiv ; y voir figurer, au contraire, le récit, arrangé naturellement ad usum scholarum, de la Restauration, du gouvernement de Juillet, de la seconde République, du règne de Napoléon iii, voilà ce qu’ils pouvaient difficilement supporter. Le ministre terminait un discours par ces paroles : « L’homme le plus libéral de l’Empire, c’est l’’Empereur[2] », et le manuel rédigé sinon par lui, au moins sous son inspiration, devait naturellement glorifier le régime existant aux dépens de la Restauration, du gouvernement

  1. Discours prononcé à la rentrée des Facultés de Dijon, 7 novembre 1859.
  2. 10 août 1863. Discours prononcé à la distribution des prix du concours général.