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séance publique.

fumée ne fait que s’épaissir tous les jours, car personne n’en est à sa dernière cartouche.

Ce préambule n’est fait que pour vous préparer à me voir faire comme tout le monde. C’est sur une question pédagogique que je voudrais appeler votre attention. Je n’en abuserai pas longtemps : l’ordre du jour de cette séance est assez chargé, et vous avez hâte d’entendre d’autres orateurs dont le talent vous promet à les écouter plus d’intérêt et de profit.

On a beaucoup discuté, on discute beaucoup encore sur le véritable but de l’enseignement secondaire. Quelques formules vagues comme celles-ci : « Nous désirons avant tout faire des hommes », ou bien : « L’éducation est la préparation à la vie », réunissent tous les suffrages ; mais aussitôt qu’on veut aller plus avant, aussitôt qu’on cherche des définitions plus précises, les dissentiments commencent. D’après les uns, l’enfant est au collège moins pour acquérir des connaissances directement et immédiatement utilisables que pour « apprendre à apprendre. » Ce sont les partisans de la « gymnastique intellectuelle. » Il faut, disent-ils, former le goût littéraire, habituer l’esprit aux méthodes scientifiques, donner à l’intelligence la rectitude et la souplesse, comme au caractère, comme au corps lui-même. — Suivant d’autres, on ne saurait trop tôt inculquer à l’adolescent, voire à l’enfant, des connaissances pratiques dont il pourra se servir aussitôt qu’il aura quitté les bancs de l’école. Il n’a pas de temps a perdre ; la lutte pour la vie est là qui l’attend ; ne tardons pas à lui fournir des armes, s’il se peut même un arsenal. L’enseignement n’est pas un moyen pour une fin éloignée, mais pour une fin prochaine, immédiate. — Loin de moi la pensée de chercher ici à résoudre ce problème rebattu, mais toujours si plein d’intérêt. On ne manque pas d’arguments à faire valoir dans les deux sens. S’il fallait absolument opter, je pencherais plutôt vers la première opinion ; mais, dans l’application, je crois qu’on peut tenir compte jusqu’à un certain point des réclamations des uns et des autres, sans, bien entendu, prétendre satisfaire les partis extrêmes.