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les variations du climat de toulouse.


dépopulation.

Ceux qui additionnent avec découragement les tables décennales en déficit, uniquement préoccupés de l’avenir, semblent ignorer, et peut-être ignorent-ils, qu’ils eurent des devanciers, pessimistes aussi, qui poussèrent le même cri d’alarme.

Diodore de Sicile n’affirme-t-il pas que le nombre des hommes était, de son temps, considérablement diminué ? Il appelle la terre un désert en comparaison de ce qu’elle était autrefois. Strabon atteste avec non moins de sincérité les pertes immenses de l’humanité. Où l’auteur de l’Esprit des lois, « dont les idées sont des principes, mais dont les relations ne sont pas toujours des vérités », a-t-il recueilli ce fait qu’il n’existait plus sur la terre au dix-huitième siècle que le trentième environ de ce qui existait autrefois ? Voilà pour le monde. L’Europe n’était pas mieux partagée au seizième siècle, si le témoignage de Vossius ne nous trompe pas[1]. Certes, il ne faut pas chercher sur quelles données reposent ces évaluations ; on y perdrait le temps. Leur exagération est évidente. Ce que nous savons de la France, à ce point de vue, quoique assez vague, paraît moins éloigné de la vérité.

La natalité décroît et la mortalité reste élevée, c’est certain. La France représente moins de la dixième partie de l’Europe, alors qu’elle en était presque la cinquième il y a cent ans. Mais si nous interrogeons les auteurs qui essayèrent les premiers d’équilibrer des statistiques, nous apprenons que ce qui se passe sous nos yeux est loin d’être un fait nouveau. Il y avait 32 millions d’habitants dans la Gaule romaine. Ce nombre atteignit 37 millions d’habitants, et même 48 d’après quelques historiens. Et voici que sous Charles ix, Puffendorf ne compte plus en France que 20 millions d’habitants. Relisez notre histoire et vous trouverez sans peine les multiples raisons de cet incroyable déficit.

  1. Voir Moheau, loc. cit.