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J’aurais pu, si j’avais été plus économe, amasser quelque chose ; mais je ressemblais à mes autres compagnes, je n’avais jamais le sol, sans savoir à quoi j’employais mon argent. Je fis ce métier l’espace de quatre ans, et je ne le quittai que par rapport à une scène plaisante, qui m’arrive et que je vais raconter.

Je revenais un soir chez moi fort tranquillement, lorsque je rencontrai deux soldats qui me parurent très-échauffés par le jus de la treille. Ces messieurs là n’ont pas coutume de laisser passer une femme, surtout quand elle est seule, sans chercher à pousser leur pointe : ceux dont je fis la rencontre étaient précisément de ce nombre là ; ils s’approchèrent de moi et me tinrent des propos assez gaillards auxquels je ne répondais pas, je les voyais en trop bon train pour chercher à les exciter. Des propos ils en vinrent aux gestes, et malgré ma résistance ils me