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DE SUZON.


J’aurois commencé à m’ennuyer de ne voir paroître perſonne, (le temps s’écoule bien lentement pour quelqu’un qui attend,) ſi les ornemens du ſallon où j’étois, ſes meubles riches & choiſis avec goût, la beauté des glaces qui le décoroient ; ſi tout enfin n’eût excité mon admiration.

Les moindres beautés de cet appartement n’avoient point échappé à mes regards curieux. De tout cet examen que réſulta-t-il ? Que je regardois Madame d’Inville comme la plus heureuſe perſonne de toute la terre. Qu’on eſt ſujet à ſe tromper, quand on apprécie le bonheur de ſes ſemblables en raiſon de leurs richeſſes. L’homme ſous des lambris dorés & couvert des vêtemens les plus précieux, cache un ame rongée de ſoucis & d’inquiétude. Envierions-nous le ſort de ce riche malheureux, ſi nous pouvions lire dans ſon cœur ulcéré ? Celui du vil artiſan, dont le travail lui fournit toutes les choſes néceſſaires à la vie, n’eſt-il pas mille fois à préférer ? Madame d’Inville

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