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DE SUZON.


trouvois bien de la reſſemblance avec cette charmante éguillette que j’avois eu tant de plaiſir à conſidérer, & qui tenoit à la ceinture des enfans de mon âge : cependant, ſa groſſeur, ſa longueur, ſa tête fiere & rubiconde, le poil noir & touffu qui le couvroit & déroboit preſque à la vue deux énormes pelotons, tout me faiſoit craindre de me tromper. En le voyant approcher du boſquet de Cythere, je voulois fuir, mais les forces me manquerent. Semblable aux Béliers dont Îles Anciens ſe ſervoient pour abattre les murailles, cet animal furieux & terrible, battoit la brèche en ruine, les obſtacles ne faiſoient que ranimer ſon courage. Pour donner plus de force aux coups qu’il frappe, il recule en arriere, s’élance avec rapidité, briſe la barriere qui avoit réſiſté trois fois à ſes attaques, & ſe plonge en m’arrachant un cri perçant, dans la fontaine du plaiſir. L’amour, fier de ſa victoire, me tenoit étroitement ſerrée dans ſes bras, appliquoit ſur

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