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choses à vous dire ; mais la plume me tombe des mains. Venez, je vous en conjure.




Je m’empressai de répondre à madame d’Épinay, je tâchai autant qu’il me fut possible de la calmer ; et pour cela je ne parlai point des torts de son mari ; je lui reprochai, au contraire, celui qu’elle avoit eu d’exiger, en quelque sorte, qu’il lui en fît l’aveu, au lieu de paroître satisfaite des marques d’attachement et de regret qu’il lui avoit données.

On peut s’imagmer encore aisément que je ne l’instruisis pas de tout ce que je savois. Il n’y avoit que trois mois qu’ils étoient mariés, et il y en avoit plus d’un que j’étois informé qu’il recherchoit une fille de la Comédie à qui il avoit fait des offres considérables#1. Je lui en avois parlé quinze jours auparavant, en lui rappelant ce qu’il se devoit à lui-même. Il nia les faits dont j’étois bien instruit ; il me fit les plus belles protestations sur la régularité de sa conduite, et feignit de se trouver offensé de mes soupçons : à mon tour je feignis[1]

  1. La danseuse Rose. Elle avait une sœur qui faisait le même métier, comme les demoiselles Verrières dont parle George Sand dans l’Histoire de ma Vie, dont parle aussi Marmontel dans ses très-intérêssants Mémoires, et qui, « dames de l’Opéra, » habitaient sur la chaussée d’Antin « une petite maison des champs. »

    Comme ce n’est qu’à l’année 1752 que commence la collection des Almanachs historiques et chronologiques de tous les spectacles, et que nous sommes ici en 1746, on ne peut pas savoir aisément de quelle Comédie mademoiselle Rose était danseuse. Il y avait, en effet, des danseuses et des danseurs à la Comédie-Française et à la Comédie-Italienne. La Camargo, par exemple, était, en 1756, première danseuse de la Comédie-Française, et, en 1759, c’était la Guimard. Madame Rose ne figure pas sur les almanachs que nous avons.