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au nez de la situation ; certaines femmes de lettres de nos amies en supportaient bien davantage ! On se faisait de tout cela, les jeudis soir, ensemble, de fameuses dérisions autour de bonnes tasses de café fumant.

Je me gardais bien de dire à ma mère que les recettes avaient grand-peine à égaler la dépense (quelque restreinte qu’elle fût) dans les externats où le loyer montait haut.

Ayant bien reconnu qu’il n’y avait rien à gagner et ne possédant rien ni les unes ni les autres, mais n’aimant pas à publier ces choses-là, nous résolûmes, Mme Vollier, Julie et moi, de nous associer. Cela faisait bien et il y avait le résultat d’envoyer à ma mère un acte d’association en bonne et due forme qui fit cesser les choses qu’on lui disait : Votre fille ne gagnera jamais rien ! Elle dépense tout et il ne faut plus rien lui envoyer, etc. ; une cuisinière gagne dix fois plus.

Nous le savions, parbleu, bien, qu’il n’y avait rien à gagner dans l’instruction ! Mais il y avait encore bien moins dans tout autre état de femme quand on ne veut pas faire danser l’anse du panier. Est-ce qu’ils sont meilleurs aujourd’hui les états de femmes ? Il est vrai que ceux des hommes ne valent guère mieux ! La pauvre Mme Vollier, coquette pour nous comme une mère, trouvait