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Des deux sœurs de ma mère, l’une, ma tante Victoire, était avec nous à Audeloncourt ; l’autre, ma tante Catherine, était aux environs de Lagny : toutes deux avaient, comme ma mère, cette netteté absolue, ce luxe de propreté qui, de leurs bandeaux de cheveux à la pointe des pieds, ne laissait ni l’ombre d’une tache ni un grain de poussière.

Ainsi elles étaient au fond du cœur !

Dans la première jeunesse de ma tante Victoire, des missionnaires prêchant à Audeloncourt avaient laissé un fanatisme religieux qui entraîne bien des jeunes filles au couvent. Ma tante fut du nombre, mais après avoir été novice ou sœur converse à l’hospice de Langres, sa santé brisée par les jeûnes la força de revenir ; c’est à cette époque qu’elle commença à habiter près de nous, à Vroncourt, où elle resta jusqu’à la mort de mes grands-parents.

Elle était de très haute taille, le visage un peu maigre, des traits fins et réguliers.

Jamais je n’entendis de missionnaire plus ardent que ma tante ; elle avait pris du christianisme tout ce qui peut entraîner : les hymnes sombres ; les visites le soir aux églises noyées d’ombre ; les vies de vierges qui font songer aux druidesses, aux vestales, aux valkyries. Toutes