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Louise Michel : Tellement nette que je n’ai jamais rien vu de pareil. (Rires.) Comment ai-je pu rire ? Madame l’a complètement rêvé.

Le témoin : Je suis ici pour dire ce que j’ai vu.

Louise Michel : Vous êtes libre de dire ce que vous voulez, mais je suis libre de dire que vous l’avez rêvé.

D. (au témoin) : Ce n’est pas librement que vous donniez votre pain à ces gens-là ? — R. Non, monsieur, c’est qu’ils arrivaient avec des gestes effrayants ; ils criaient : « Du travail et du pain ! »

Louise Michel : Oh ! ils étaient bien effrayants ! J’étais aussi bien effrayante ! Ces dames étaient complètement hallucinées d’effroi ; elles regardaient Louise Michel comme une espèce d’hydre.

Cornat, officier de paix du VIe arrondissement : Le 9 mars dernier, apprenant qu’une bande parcourait l’arrondissement en poussant des cris séditieux, je vais à sa poursuite et je l’atteignis place Maubert. La bande était dirigée par Louise Michel, ayant à ses côtés Pouget et Mareuil. J’arrête ces deux derniers et Pouget me traita de lâche et de canaille. Quant à Louise Michel elle put s’esquiver. Tous ces gens-là criaient : « Vive la Révolution ! à bas la police ! »

D. Louise Michel ne vous a-t-elle pas dit quelque chose ? — R. Elle m’a dit : « Ne me faites pas de mal ! »

Blanc, gardien de la paix au VIe arrondissement : Le 9 mars dernier, un gardien est venu prévenir l’officier de paix qu’on pillait une boulangerie rue des Canettes. Nous nous sommes mis à la poursuite de la bande et nous l’avons atteinte place Maubert. M. l’officier de paix a arrêté Louise Michel qui lui a dit : Ne nous faites pas de mal, nous ne demandons que du pain ! Pouget a traité M. l’officier de paix de lâche et de canaille. Mareuil criait : « À bas la police ! à bas Vidocq ! Vive la révolution sociale ! » Les assaillants avaient des cannes plombées, des revolvers et des couteaux.

Louise Michel : Je n’ai jamais dit : « Ne nous faites pas de mal, » mais seulement : « On ne vous fera pas de mal. » Tous ces messieurs étaient dans le plus grand trouble.

D. (à Louise Michel) : Il n’y avait que vous de sang-froid ? — R. Nous en avons tant vu ! je proteste pour l’honneur de la Révolution ! J’ai bien le droit de relever les variations des témoins. Je ne me suis jamais prosternée devant personne. Je