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Il m’a toujours semblé que nous sentons la destinée, comme les chiens sentent le loup ; parfois cela se réalise avec une précision étrange.

Si on racontait une foule de choses dans de minutieux détails, elles seraient bien plus surprenantes.

On croirait parfois voir les Contes d’Edgar Poë.


Que de souvenirs ! Mais n’est-il pas oiseux d’écrire ces niaiseries ? Hier j’avais peine à m’habituer à parler de moi ; aujourd’hui cherchant, dans les jours disparus, je n’en finis plus, je revois tout.

Voici les pierres rondes au fond du clos près de la butte et du bosquet de coudriers ; des milliers de jeunes crapauds y subiraient en paix leurs métamorphoses, s’ils ne servaient à être jetés dans les jambes des vilaines gens. Pauvres crapauds !

Dans la cour, derrière le puits, on mettait des tas de fagots de brindilles, des fascines ; cela nous servait à élever un échafaud, avec des degrés, une plate-forme, deux grands montants de bois, tout enfin ! Nous représentions les époques historiques, et les personnages qui nous plai-