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Les fruits calédoniens, figues sentant la cendre, pommes âpres de l’acajou, grosses mûres couvertes d’une couche blanche qui ressemble au sucre mais qui ne sent rien, prunes jaunes à l’énorme noyau rond, ne sont pas bons dit-on ; moi, je les aime tels, bien mieux que ceux d’Europe.

Je les aimais surtout dans le silence profond de la forêt, quand je les cueillais aux buissons entre les rochers et le chemin de laves ; que le vent de mer soufflait en foudre, et que j’avais dans ma poche, pour jusqu’au prochain courrier, quelque bonne lettre de ma mère et de Marie.

Les insectes calédoniens n’ont pas encore de venin, ils connaissent l’homme depuis trop peu de temps, sans doute, pour que la nécessité ait distillé le venin. Les serpents d’eau ont les crochets trop courts et leur espèce (qui s’éteint partout) le sera là comme ailleurs avant que les crochets n’aient crû.

Ces serpents sont grands et très beaux : les uns rayés blanc et noir par anneaux ; les autres noir et blanc. Quelques-uns d’entre nous en ont apprivoisé. J’en ai eu un pendant longtemps dans un trou d’eau que j’avais creusé à cet effet dans la baraque dont j’avais fait une serre, mais je l’ai laissé partir à cause de ma vieille chatte qui