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Julie apportait je ne sais quoi du pays. Adèle Esquiros s’était chargée de friandises.

C’était jour de congé, nous avions bien chaud toutes les quatre dans la petite chambre d’en haut. Nous parlions gaiement, surtout Mme Vollier que je n’avais jamais vue aussi gaie.

J’avais raconté comment j’avais, la veille, collé une affiche républicaine sur le dos d’un sergent de ville. Celle-là me restait, il fallait bien la placer quelque part.

Sur le piano ouvert, le gros chat noir passait et repassait, écoutant le motif qui l’éveillait sous ses pattes ; il avait la tête un peu montée, le gros Raton, ayant mangé tout un bol de crème au café dont je ne parlais pas.

Mme Vollier racontait comment, dans l’intérêt de la maison, elle avait mis les clefs dans sa poche ; elle les faisait sonner avec ce sourire des yeux que j’avais vu à ma grand’mère et que je vis tant de fois à ma mère quand elles ravissaient quelque chose à mes petits vols.

Nos amis l’applaudissaient, mais on rit bien davantage quand par remords de conscience je lui restituai le porte-monnaie que j’avais volé le matin dans la commode. Il n’y manquait presque rien.

Je ne sais quel serrement de cœur me prit ;