Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/163

Cette page a été validée par deux contributeurs.

après la mort de Mme Vollier et le départ de ma cousine Mathilde qui avait passé quelques mois avec moi. La dernière fois que j’ai vu la tombe de Mlle Poulin, c’était aux jours de mai 71. Dans la nuit du 22 au 23, je crois. Nous étions au cimetière Montmartre qu’on tâchait de défendre à trop peu de combattants.

Nous avions crénelé les murs comme nous pouvions, et si ce n’eût été la batterie de la butte dont le tir trop court nous mitraillait, et des obus venant par intervalles réguliers du côté où l’on voit de hautes maisons, la position n’aurait pas été mauvaise.

Cet obus, déchirant l’air, marquait le temps comme une horloge ; c’était magnifique dans la nuit claire où les marbres semblaient vivre.

À la même compagnie, avec laquelle j’avais été le premier jour de la lutte, appartenaient ces hommes.

Plusieurs fois nous étions allés en reconnaissance, tantôt l’un tantôt l’autre ; la promenade dans cette solitude fouillée d’obus me plaisait ; j’avais voulu malgré mes camarades y retourner plusieurs fois ; toujours le coup arrivait trop tôt ou trop tard pour moi.

Nous avions déjà des blessés, et j’eus bien de la peine à obtenir de retourner, c’est-à-dire