Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/157

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’amour de la République et la haine des Césars.

Combien d’ouvrages effeuillés aujourd’hui furent commencés sous ces impressions !

Il me souvient d’un énorme manuscrit, la Sagesse d’un fou, que je portai à Eugène Pelletan, alors notre président, pour qu’il le lût et m’en dît son avis. J’ai compris depuis quelle patience il lui avait fallu pour lire cet énorme grimoire et en annoter quelques passages.

— Non, avait-il écrit, ce n’est pas la sagesse d’un fou, ce sera un jour la sagesse des peuples.

En rapportant mon manuscrit, il me semblait marcher en l’air ! J’en relus une bonne partie soigneusement, puis le temps me manqua, il fallait de plus en plus donner des leçons après les classes, et la Sagesse d’un fou alla avec les autres ouvrage. Peut-être aurais-je cherché un éditeur pour celui-là si j’avais eu le temps.

Maria L…, aussi, avait effeuillé bien des choses. Jeanne B… et peut-être sa sœur devaient avoir des manuscrits en train. Julie L… et Mlle  Poulin (que je puis nommer puisqu’elle est morte) ont jeté au vent bien des vers. Il y avait, rue Hautefeuille, une véritable pépinière de bas bleus, les deux dernières années avant 71.

Mais prose, vers et motifs s’en allaient au vent ; nous sentions tout près le souffle du drame