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Oui j’en avais vu des bandits et des filles et je leur avais parlé. Combien j’en vis depuis et combien de choses ils me racontèrent !

Est-ce que vous croyez qu’on vient au monde avec un couteau ouvert pour chouriner ou une carte à la main pour se vendre ? On n’y vient pas non plus avec une canne plombée pour être sbire, ou un portefeuille de ministre pour être pris des vertiges du pouvoir, et traîner des nations dans sa chute.

Nul bandit qui n’aurait pu être un honnête homme ! Nul honnête homme qui ne soit capable de commettre des crimes dans les affolements où jettent les préjugés du vieux monde maudit !

Ce même Jules Favre qui trempa dans l’égorgement de Paris, parce que le pouvoir l’avait empoisonné (comme il empoisonne du sang au cerveau tous ceux qu’on revêt de cette tunique de Nessus), ce même Jules Favre nous l’avions aimé comme un père et il était avec nous d’une bonté paternelle.

Combien de fois, sous prétexte qu’il était notre président, je lui conduisis des gens qui avaient besoin d’une consultation d’avocat et ne pouvaient la payer !

Il me souvient qu’un jour où je lui avais con-