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juste le fil qu’elles y mettent, mais rapporte beaucoup à l’entrepreneur. Il y en a qui tiennent à la vie. Alors, poussées par la faim, le froid, la misère, attirées par les drôles ou drôlesses qui vivent de ça, — il y a des vers dans toutes les pourritures, — les malheureuses se laissent enrégimenter dans l’armée lugubre qui traîne de Saint-Lazare à la Morgue.

Tenez, quand une misérable qui barbote dans la fange, prend dans la poche d’un pante, comme elles disent, plus qu’il ne lui donne, tant mieux ! Pourquoi y allait-il ? S’il n’y avait pas tant d’acheteurs on ne trafiquerait pas sur cette marchandise.

Et quand une honnête femme, calomniée ou poursuivie, tue le drôle qui la pourchasse, bravo ! Elle débarrasse les autres d’un danger, elle les venge ; il n’y en a pas assez qui prennent ce parti-là.

Si les femmes, ces maudites, qui, même suivant Proudhon, ne peuvent être que ménagères ou courtisanes, — elles ne seront pas autre chose dans le vieux monde, — sont fatales souvent, à qui la faute ? Et qui a pour son plaisir développé leur coquetterie et tous les autres vices agréables aux hommes ? Une sélection s’est faite de ces vices-là à travers les temps. Cela ne pouvait être autrement.