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MÉMOIRES

voyage. J’avais le cœur trop joyeux pour souffrir du mal de mer ! Je quittais Londres sans emporter d’autres regrets que celui d’y être revenue, après mes cinq années de pensionnat. Toutes les maisons m’y paraissaient des tavernes, toutes les boissons des narcotiques, tous les hommes des marchands de diamants. — Plus d’une fois la pensée me vint de faire graver sur une bague que j’aurais mise au pouce de mon pied, cette devise : « Saunders shocking for ever !… »

Nous descendîmes à l’Hôtel d’York et d’Albion. Dès le lendemain de notre arrivée, mon « mari » me fit monter sur l’Arc-de-Triomphe, puis il me mena dans les égouts, aux caveaux du Panthéon, devant le bassin des Tuileries, où nous vîmes des poissons rouges. Nous allâmes après au spectacle, au Bois, aux concerts. À Meudon, nous fîmes une promenade à cheval dont nous revînmes, moi, avec un costume lamentablement déchiré, lui, sur une bête aveugle. Comme nous nous plaignions de ces disgrâces, le loueur nous assura que ces choses-là pouvaient arriver à tout le monde.