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sions aveugles, les entraînements fatals, non ! Je ne les ai pas connus pour mon repos et mon bonheur. J’ai toujours regardé l’amant de cœur comme un racontar, un mot creux. Parmi les femmes que j’ai fréquentées, — et elles sont nombreuses, — j’en ai vu des masses qui s’abusaient étrangement sur la matière. Elles finissaient par croire à l’amant de cœur, par leur seul désir d’y croire, confondant le masque avec le visage, le singe avec l’homme, Clichy-la-Garenne avec une forêt vierge du nouveau monde.

Un homme beau, jeune, aimable, qui m’a loyalement offert son bras, son amour, son argent, a tout droit de se croire et de se dire vraiment « mon amant de cœur », mon amant pour une heure, mon cavalier pour un mois, mon ami for ever ! Voilà comme je comprends la chose. D’ailleurs mon tempérament n’est pas aux ardeurs immodérées. On m’a reproché ma froideur et mon mépris profond. Eh bien, de glace pour l’espèce j’ai fait souvent exception pour l’individu ! Un très petit nombre, — mais pour moi cela suffit, — sait bien que