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polonaises. Mais, après sa mort, les Polonais détruisirent son œuvre ; et les guerres des Cosaques recommencèrent aussitôt et se prolongèrent presque sans cesse jusqu’à ce qu’un des hetmans les plus célèbres de l’Ukraine, Bohdan Khmelnytzki, en 1648, mena ses guerres victorieuses contre la Pologne, soutenu plus que jamais par tout le peuple ukrainien qu’un enthousiasme unanime poussait à la défense de sa liberté. Après avoir battu l’ennemi à maintes reprises, il eût pu marcher sur Varsovie ; mais il jugea plus sage de conclure avec la Pologne des traités avantageux. L’Ukraine devint une République indépendante dont le chef entretint des relations diplomatiques avec des États étrangers : la Suède, la Transylvanie, la Moldavie, la Turquie, la Moscovie, la Pologne, la Perse.

Cette République avait une organisation très originale. L’hetman, chef des Cosaques, était aussi chef du pays. Il était élu par l’Assemblée des Cosaques, la Rada, qui prenait des décisions militaires et décidait aussi du sort du pays. Il avait auprès de lui son état-major qui remplissait les fonctions d’un véritable Conseil des ministres (il y avait un secrétaire général, un juge général, un intendant général, etc.). Les divisions administratives étaient établies suivant les territoires où se recrutaient les régiments, les centuries de Cosaques. Les colonels et leurs états-majors (secrétaires, juges, intendants) étaient, en même temps que des chefs militaires, les magistrats des districts occupés par leurs troupes. Seules les grandes villes, les propriétés ecclésiastiques et quelques grandes propriétés privées jouissaient d’une autonomie relative et dépendaient directement de l’hetman.

Au retour de deux voyages en Ukraine, Paul d’Alep dépeint la civilisation dans ce pays libre qu’il compare à la Moscovie qui lui a fait l’impression d’une prison et qu’il ne peut se rappeler sans horreur. L’État ukrainien réalisait en effet de grands progrès ; mais les événements évoluaient trop vite : la jeune République n’obtenait pas la tranquillité relative sans laquelle un État ne peut pas se consolider. Sous Bohdan Khmelnytzki, l’Ukraine poursuivit sans cesse la guerre contre les Polonais afin de défendre son indépendance ; et cette lutte perpétuelle mettait le pays dans une situation très dure. L’Ukraine cherchait un allié.