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HISTOIRE DE LA LITTERATURE ERANÇAISE 35

traité avec la même compétence et le même soin que les autres. Or c'est bien ici le cas. M. Suchier a marqué il y a longtemps déjà sa place dans les études relatives à la littérature proven- çale : il y a fait des découvertes, publié des textes, émis, comme sur tous les sujets dont il s'occupe, des vues personnelles et intéressantes, et son esquisse, si brève qu'elle soit, est tracée avec autant de sûreté que d'élégance. J'en signalerai un ou deux traits qui m'ont trappe '.

L'auteur exprime à plusieurs reprises Topinion qu'avant Guil- laume IX, le plus ancien troubadour dont il nous soit resté quelque chose, il n'existait pas au Midi une poésie lyrique d'art présentant, pour le fond et pour la forme, les caractères si par- ticuliers de la poésie des troubadours. Il me semble que deux considérations militent contre cette manière de voir. M. Suchier remarque lui-même que Guillaume, comte de Poitiers et duc de Guyenne, a employé dans ses poésies non le poitevin ni le gascon, mais le limousin, et que Cercamon et Marcabrun, tous deux Gascons, ont fait de même : comment s'explique ce fait, si ce n'est par l'existence antérieure d'une poésie limousine qui

��I. Voici quelques observations de détail. Sur quoi se fonde (p. 56) l'attri- bution du Bokc au milieu du x^ siècle ? (Notons que le christianisme de Boèce est aujourd'hui démontré). — L'attribution (p. 57) à Guillaume Vil de l'an- cienne version du Brevarium Alarici est une très jolie conjecture. — Le nom de Daspol (p. 68) est à ra\'er et à remplacer par celui de Guillaume d'Autpol (voir Hisl. litt. de la France, t. XXXII, p. 67-73). — P- 73)1^ traduction de jai, dans une chanson d'Arnaud de Marueil, par Elstcr, est peu heureuse : si déjà le poète nous étonne en faisant chanter, la nuit, le geai avec le rossignol (peut-être pourrait-on lire : Chantai rossinhols h jiis ?), il est encore plus bizarre de donner ce rôle à la pie. — P. 84, est-il bien sûr que la lyrique alle- mande, à- ses débuts, soit complètement indépendante de la lyrique française et provençale ? — P. 86, je trouve bien téméraire la supposition que Bechada serait l'inventeur de la forme de laisse, caractérisée par le petit vers féminin de la fin, qui se retrouve dans un certain nombre de poèmes français énumé- rés au chapitre précédent. — P. 88, M. Suchier continue à penser que le fragment épique provençal qu'il a jadis publié peut appartenir à un roman du Comte de Toulouse ; j'ai donné ailleurs des raisons, qui me semblent valables, de révoquer en doute cette hypothèse (voir Le Roman du Comte de Toulouse, Paris, 1900, p. 24).

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