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CLIGÈS 261

C'est là uiie hypothèse assez en l'air ' . « Clîgès aurait donc été écrit entre 1152 et 1164, ce qui d'ailleurs est évident de soi. » Cette évidence m'échappe : pourquoi CUgès doit-il avoir été écrit avant 11 64 ? Est-ce parce que c'est l'année du mariage de Henri ?Page xiii, M. Fôrster se contente de dire que CUgès est postérieur à Érec, quia été écrit « avant iiéo » (pourquoi?). Pag-e xxxviii, il dit que, vu l'étroite liaison de Cligésawec Tris- tan, il convient de le mettre le plus près possible à'Erec, donc avant 11 60 (?) Et il suppose que Chrétien, en faisant épouser à l'empereur de Constantinople la fille de l'empereur d'Allemagne, a pu être influencé par les négociations qui furent menées, sans succès d'ailleurs, de 1153 à 1155, en vue du mariage de Fré- déric P"" avec une nièce de Manuel. C'est tiré de loin ! « D'après cela, C%^'5 tomberait vers 1155, si bien qu'il faudrait placer vers II 50 Tristan et Érec, qui lui sont antérieurs. » Mais à la page XII, l'auteur reconnaît que Troie, Enéas et Thêhes sont antérieurs à Érec : il faudrait donc placer ces romans avant 11 50, ce qui est impossible, au moins pour Troie, dédié par son auteur à Aliénor, reine d'Angleterre, donc écrit en tout cas après 1154, et probablement vers 11 60-. D'autre part, si on plaçait CUgès en II 5 5, comme on ne peut guère supposer Lancelot écrit avant 1 170 (voir plus loin), il faudrait admettre que Chrétien est resté une quinzaine d'années sans rien produire, ce qui est fort

��1 . Il est vrai que les évêques de Beauvais devaient l'hommage aux comtes de Champagne pour le fief de Savigni (voir Longnon, Feoda Cainpaniae, nos 1042, 5177); mais ce fait, — si fréquent dans les rapports complexes de la féodalité, — ne créait entre l'évêque et le comte aucun lien particulier, et Beauvais même ne relevait nullement ducomte Henri. — M. Ed. Wechssler (D;V Sagevoiii Ijeiligen Gral, p. 149) s'est imaginé de son côté, uniquement parce que Chrétien avait lu un livre appartenant au chapitre de Saint-Pierre, qu'il était chanoine et même chancelier ou écolâtre de ce chapitre !

2. La façon dont Benoit parle d' Aliénor, dans le passage bien connu de Troie, indique qu'elle n'était pas au début de sa royauté. D'autre part, vers II 74, Henri II chargeait Benoit de la traduction des chroniques normandes qu'il avait d'abord confiée à Wace, et il est probable que c'est l'âge avancé de celui-ci qui lui avait fait préférer un concurrent plus jeune ; il n'est donc pas indiqué de mettre un trop long intervalle entre Troie et la Chronique des ducs de Normandie.

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