Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/135

Cette page n’a pas encore été corrigée

ÉLIE DE SAIXT-GILLES I 3 I

tout entière l'œuvre d'un continuateur, sans doute du renia- nieur même qui a fait d'Elie de Saint-Gilles le père d'Aioul, et nous n'en tiendrons pas compte dans notre appréciation de la chanson.

En nous en tenant aux 2343 ver? qui précèdent, nous reconnaîtrons que nous n'avons pas encore ici l'œuvre sous sa forme primitive. Comparons le manuscrit français à la version norvégienne, nous verrons que celle-ci repose sur un texte assez différent et en général plus ancien. Je ne m'étendrai pas sur cette comparaison, que M. Kôlbing a faite le premier, et que M. Raynaud a reprise avec beaucoup de soin. Je n'en signa- lerai qu'un trait. Le texte français fait d'Elie le neveu de Guil- laume d'Orange; il dit lui-même (v. 1085-86) :

Guillaumcs est mes oncles, li marcliis au cort nés, Mes grans sire i Aymeris de Nerbone sor mer '.

La saga ne sait rien de cette parenté, qui était certainement inconnue au poème original: plus d'un passage qui subsiste dans la chanson française contredit l'assertion que nous venons de reproduire, et prouve que les seigneurs de Saint-Gilles n'ont rien à faire avec Guillaume d'Orange, non plus qu'avec Aioul ; nous prenons ici sur le fait le travail cyclique et même, si l'on peut ainsi dire, épicyclique des jongleurs, travail qui est d'ail- leurs resté tout extérieur et n'a pas pénétré l'œuvre entière.

La chanson d'Elie est écrite en alexandrins assonants, mais la seconde laisse (v. 32-80) est presque tout entière en déca- syllabes, et des décasyllabes isolés se rencontrent assez souvent

��1. On sait que le xnol grandsin, au sens de grand-père, est resté en anglais.

2. Dans la dernière laisse aussi (v. 2569), Élie appelle Guillaume son oncle. Je ne m'explique pas comment M. Fôrster a pu dire et répéter avec insistance (p. xlvii-xlviii) que cette parenté n'était pas mentionnée dans notre poème, et que, par conséquent, l'éditeur français s'était trompé en disant qu'Aubri de Trois-Fontaines, qui fait d'Élie (voyez ci-dessus) le neveu de Guillaume d'Orange, avait puisé dans un teste pareil au nôtre. On ne pourrait alléguer qu'Aubri fait de Guillaume l'oncle maternel d'Élie, ce que ne dit pas le poème, car il était impossible d'ajouter Julien aux frères bien connus de Guillaume, et l'explication d'Aubri lui était imposée.

�� �