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RIENZI.

tout ce qu’on voit et qu’on entend dans la ville que nous venons de quitter. Vous me regardez tout surpris. Voyez, ma reine, les merveilles de votre cour ont privé de la parole notre nouveau galant ; je vous assure pourtant qu’il n’était pas muet quand il n’avait que nous à qui parler : bien au contraire, car j’ai été obligée de lui imposer silence.

— Oh ! alors vous ne l’avez pas encore informé des coutumes et de l’origine de la cour où il entre ?

— Non, ma reine ; j’ai cru que toute description donnée dans un lieu aussi funeste que notre pauvre Florence d’aujourd’hui manquerait son but. Ma tâche est accomplie. J’abandonne le reste à votre grâce. »

En même temps, la dame s’éloigna d’un pas léger, et se mit à lisser d’un air coquet ses cheveux bouclés devant le miroir poli d’un bassin de marbre, dont les eaux franchissaient le rebord pour se jouer en bas sur le gazon ; de temps à autre elle lançait à l’étranger un coup d’œil malin, se tenant assez près pour entendre toute la conversation.

« En premier lieu, seigneur, permets-nous de te demander ton nom, ton rang, et ton lieu de naissance, dit la dame qui portait le titre de reine.

— Madame, répondit Adrien, je ne pensais guère, en venant ici, répondre à ces questions ; mais puisqu’il vous plaît de me les faire il doit me plaire d’y répondre. Mon nom, est Adrien di Castello, membre de la famille romaine des Colonna.

— Noble colonne d’une noble maison ! répartit la reine. Pour nous, car vous pouvez avoir la curiosité de nous connaître, sachez que nous sommes six dames de Florence, abandonnées ou privées de nos parents et protecteurs, qui avons pris la résolution de nous retirer en ce palais, où la mort, si elle vient nous surprendre, vienne au moins dépouillée de la moitié de ses horreurs ; et