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RIENZI.


CHAPITRE III.

Les fleurs au milieu des tombeaux.

Adrien s’aperçut que le Becchino avait pris soin de ne point laisser la famine devancer la peste ; les restes du festin du défunt étaient enlevés, et des viandes fraîches, des vins de toute espèce, car il y avait abondance alors à Florence !… couvraient la table. Il prit sa part de ces rafraîchissements, mais avec beaucoup de modération ; et, comme il lui répugnait de reposer dans des lits dont les splendides tentures avaient recélé déjà le travail de la mort, il ferma soigneusement les portes et les fenêtres, s’enveloppa de son manteau, et se reposa sur les coussins de la chambre où il avait soupé. La fatigue le plongea dans un sommeil agité, dont il fut tout à coup réveillé par le roulement d’un chariot qui passait sous sa fenêtre et par le tintement de quelques clochettes. Il écouta, pendant que le chariot s’en allait lentement de porte en porte, et le bruit se perdit enfin dans l’éloignement.

Il ne dormit plus, cette nuit-là !

Le soleil n’était pas levé depuis longtemps lorsqu’Adrien recommença ses recherches ; et il était encore de bonne heure lorsqu’en passant devant une église, il vit deux dames richement habillées sortir du portail et regarder de son côté, à ce qu’il lui sembla, avec une sérieuse attention à travers leurs masques. Il s’arrêta de son côté à les considérer, quand une de ces dames lui dit : « Beau sire,