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RIENZI.

gardez-vous cette maison pendant votre séjour à Florence, signor ?

— Oui, si le maître légitime ne la réclame pas.

— Ha ! ha ! Le maître légitime ! La peste, voilà le maître de tout, maintenant ! J’ai déjà connu trois belles compagnies, qui ont occupé cet endroit la semaine dernière, et je les ai enterrées tous, tous ! C’est une maison assez agréable, et qui nous rapporte pas mal. Êtes-vous seul ?

— Pour le moment, oui.

— Montrez-nous où vous couchez, afin que nous sachions où venir vous prendre. Vous n’aurez pas besoin de nous d’ici à trois jours, à ce que je vois.

— Trêve de vos compliments ! dit Adrien ; écoutez-moi. Savez-vous trouver les vivants aussi bien qu’enterrer les morts ? Je cherche dans cette ville une dame, qui vous vaudra, si vous la découvrez, autant qu’une année d’enterrements.

— Non ! non ! Ça sort de nos attributions. Autant chercher un grain de sable tombé sur la plage que de chercher un être vivant dans ces maisons closes et ces voûtes béantes ; mais si vous voulez payer d’avance les pauvres fossoyeurs, je vous promets de vous donner l’étrenne d’un charnier tout neuf, qui sera fini justement pour l’époque où vous en aurez besoin.

— Voilà ! dit Adrien, lançant à ces misérables quelques pièces d’or, voilà ! Et si vous voulez me rendre un service de plus, laissez-moi tranquille tant que je suis encore vivant, ou je vais vous en épargner la peine. » Et il sortit de la salle.

Le Becchino qui avait pris la parole le suivit. « Vous êtes généreux, seigneur, attendez : il vous faut une nourriture plus fraîche que ces sales débris. Je vous en fournirai et de meilleure, tant qu’il vous en faudra. Et voyons, qui donc voulez-vous que je cherche ? »