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RIENZI.

— Il est vrai que c’était une bien mauvaise plaisanterie, dirent plusieurs personnes en secouant la tête.

— Et lorsqu’il s’est fait armer chevalier, quelle parade ! Heureusement qu’il a encore eu le bon sens de faire couler du vin par les naseaux du cheval de bronze : il n’y avait que cela de raisonnable.

— Mes maîtres, dit Cecco, la vraie folie qu’il a faite, c’est de ne pas décapiter les barons, quand il les tenait tous dans ses filets, comme dit Messire Baroncelli. (Ah ! Baroncelli est un honnête homme, et qui ne va pas par quatre chemins !) C’était en quelque sorte trahir le peuple que de ne pas le faire. Car enfin, sans cela, nous n’aurions jamais perdu tant de bons garçons à la porte de San-Lorenzo.

— C’est vrai, c’est vrai, c’est honteux : on dit que les barons l’ont payé pour ça.

— Et puis, fit observer un autre, ces pauvres seigneurs Colonna, le père et le fils, c’étaient les meilleurs de la famille, après Castello. J’avoue que je les plains.

— Mais revenons à la question, dit un autre des assistants, le plus riche de la bande ; revenons à l’impôt, c’est de cela qu’il s’agit. Quelle ingratitude de nous taxer ! Qu’il le fasse, et il verra !

— Oh ! il n’osera pas ; car j’ai ouï dire que le pape finit par se fâcher tout rouge : et par conséquent il n’a plus que nous sur qui compter. »

Ici la porte s’ouvre brusquement. Un homme se précipite dans la salle en criant à tue-tête :

« Maîtres ! maîtres ! le légat du pape est arrivé à Rome, et a envoyé chercher le tribun, qui vient de le quitter à l’instant. »

Avant que les auditeurs fussent revenus de leur surprise, le son des trompettes les fit décamper ; ils virent Rienzi passer près d’eux avec sa cavalcade ordinaire et son fringant appareil. La soirée avançait, et des porteurs