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RIENZI.

Rienzi, à la mort même, Nina sera à tes côtés. La vie et l’honneur ne lui viennent que de toi ; et le coup qui abattra le corps anéantira l’ombre débile. Je ne me séparerai point de toi.

— Nina, dit le tribun, agité par de violentes et convulsives émotions, vous avez dit… la mort : c’est peut-être de la mort qu’il s’agit en effet. Allez, quittez un homme qui ne peut plus protéger ni Rome, ni vous-même.

— Jamais, jamais je ne le quitterai.

— Vous êtes résolue ?

— Je le suis.

— Qu’il en soit ainsi, dit le tribun avec un ton de profonde tristesse. Prépare-toi donc aux plus mauvais jours.

— Il n’y a point de mauvais jours avec toi.

— Viens dans mes bras, vaillante femme, tes paroles font honte à ma faiblesse. Mais ma sœur ! — si je succombe, vous, Nina, vous ne voudrez pas survivre ; vous ne voudrez pas laisser votre beauté en proie au cœur le plus luxurieux et au bras le plus robuste. Nous aurons le même tombeau sur les débris de la liberté romaine. Mais Irène n’est pas trempée d’acier comme vous. La pauvre enfant, je lui ai déjà enlevé son amant, et aujourd’hui…

— Vous avez raison ; faites partir Irène. Nous pouvons même lui déguiser le motif réel de son départ. Un voyage est ce qu’il y a de mieux pour son chagrin, et ne peut que passer pour un acte de bienséance, destiné à tromper la curiosité. Je vais la voir et l’y préparer.

— Faites-le, ma chère amie. Je serai bien aise de rester un moment seul avec mes pensées. Mais, rappelez-vous qu’il faut qu’elle parte aujourd’hui : le temps presse. »

Pendant que la porte se fermait sur Nina, le tribun reprit sa lettre pour la relire de sang-froid. « Ainsi le légat du pape a quitté Sienne ; il a prié cette république de retirer de Rome ses troupes auxiliaires, il m’a proclamé rebelle et hérétique, et de là, il est passé à Marino, où il