Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 2, 1865.djvu/45

Cette page a été validée par deux contributeurs.
41
RIENZI.

et ses résultats assurés dans le rétablissement d’une paix complète. Mais les soldats attendaient encore leur paye ; ils commençaient à murmurer ; le trésor était vide, il fallait, pour le remplir, lever un nouvel impôt.

Parmi les conseillers, il y en avait dont les familles avaient rudement souffert de la bataille ; ils accueillirent avec peu d’ardeur la proposition de continuer la lutte. D’autres, et Pandulfo était du nombre, timides mais bien intentionnés, s’apercevant que la douleur et l’effroi inspirés à la nation par son triomphe même, avaient produit une réaction dans le peuple, déclarèrent qu’ils ne se risqueraient point à conseiller un nouvel impôt. Un troisième parti, qui avait Baroncelli pour chef, présentait une opposition plus déterminée. L’ambition de ce démagogue était sans principes ; mais en caressant les plus mauvaises passions de la populace, en gagnant ses sympathies par la grossièreté d’une nature brutale, en étalant cette affectation de zèle progressif que nous appelons aujourd’hui « le mouvement, » et qui souvent donne au fou le plus enragé un avantage sur l’homme d’État le plus prudent, il s’était tout doucement acquis une grande influence sur les classes inférieures. Ses partisans osaient même blâmer le fier tribun de l’extravagante splendeur qu’eux-mêmes ils avaient été les premiers à recommander, et ne craignaient pas d’insinuer sourdement que c’était pour des motifs sinistres et perfides qu’il avait sauvé les barons de l’accusation de Rodolphe. La liberté fut abandonnée au sein de ce même parlement que le tribun avait ressuscité et reconstitué pour le maintien de la liberté. Un sombre silence accueillit son éloquence ardente, et à la fin, les votes se prononcèrent contre la nouvelle taxe et la marche sur Marino qu’il avait proposées. Rienzi leva la séance avec précipitation et tout ému. Comme il quittait la salle, une lettre fut mise entre ses mains ; il la lut et demeura quelques instants comme