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RIENZI.

grand, et dévoue ainsi sa vie à un effort unique et constant, pour accomplir la prophétie ! Est-ce une folie ! — Ce serait folie si tout s’arrêtait à la tombe ! Mais qui sait si cet élan donné à nos facultés ici bas, souvent pour un bien terrestre qui ne vaut guère, ne doit pas servir, dans les desseins de la Providence, à préparer l’âme ravivée et ennoblie par l’exercice de sa vertu, à quelque haute destinée au delà de la terre ! Qui le sait ? Ce n’est pas moi. — Prions ! »

Tandis que le sénateur était occupé de ces rêveries, Rome, dans ses divers quartiers, offrait des scènes moins édifiantes et moins tranquilles.

Dans la citadelle des Orsini, des lumières couraient de côté et d’autre à travers les grilles de la grande cour. On eût pu voir Angelo Villani sortant à la dérobée par une porte de derrière. Une heure après, la lune était déjà élevée dans le ciel, et vers les ruines du Colisée, des hommes dont le costume annonçait le rang infime, sortaient à pas de loup, deux par deux, des ruelles et des allées ; du sein de ces ruines se glissait encore la figure du fils de Montréal. Plus tard même, la lune va se coucher, — une lueur grisâtre commence à naître à l’Orient, et les portes de Rome, du côté de Saint-Jean de Latran, sont ouvertes ! Villani s’entretient avec les sentinelles. La lune a disparu, les montagnes sont voilées d’une brume triste et glaciale. Villani est devant le palais du Capitole — le seul soldat qui reste en ces lieux ! Où sont donc les deux légions romaines qui devaient garder à la fois la liberté de Rome et son libérateur ?