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RIENZI.

lâche et meurtrière, qui faisait l’habileté des princes d’Italie plus fortunés que lui, ne fut appelé en aide à l’ambition ou à la sécurité du dernier tribun romain. Quelles que fussent ses erreurs, il vécut et mourut comme il convenait à un homme possédé d’un vain rêve, mais d’un rêve glorieux, en croyant pouvoir, dans une populace lâche et corrompue, raviver le génie de l’ancienne république.

De tous les gens altachés à la personne du sénateur, le plus assidu et le plus honoré était toujours Angelo Villani. Rienzi l’avait élevé à des fonctions civiles d’une haute importance ; car le sénateur se sentait rajeunir par le plaisir de trouver quelqu’un qui eût des titres à sa gratitude. Ce jeune homme lui inspirait autant d’amour et de confiance qu’un fils : Villani ne quittait jamais ses côtés, que pour aller à des conférences avec les différents chefs populaires dans les divers quartiers de la ville ; il montrait pour ces conférences, un zèle infatigable : il semblait même y sacrifier sa santé, et Rienzi le grondait tendrement, toutes les fois, qu’éveillé en sursaut de ses propres rêves, il rencontrait le regard distrait et la pâleur livide qui avaient remplacé l’ail étincelant et les fraîches couleurs de la jeunesse.

À ces réprimandes l’adolescent ne faisait jamais qu’une seule et invariable réponse :

« Sénateur, j’ai un grand devoir à remplir, » et à ces mots il souriait.

Un jour Villani, seul avec le sénateur, dit un peu brusquement : « Vous rappelez-vous, seigneur, que devant Viterbe je sus faire usage de mes armes avec assez de bonheur pour que le cardinal Albornoz lui-même prît plaisir à le remarquer ?

— Je me souviens bien de votre valeur, Angelo ; mais pourquoi cette question ?

— Monseigneur, Bellini, le capitaine des gardes du Capitole, est dangereusement malade.