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RIENZI.

donner passage à six hommes armés, qui ne s’arrêtèrent pas devant les frères : l’un d’eux toucha Montréal.

« Ah ! dit-il, toujours endormi, mais en se retournant ; ah ! répéta-t-il dans sa douce langue provençale, ma charmante Adeline, nous n’allons pas encore nous lever. Il y a si long-lemps que nous ne nous sommes vus !

— Que dit-il donc ? » marmotta le garde en secouant rudement Montréal. Le chevalier se leva en sursaut, et sa main fouilla le chevet de son lit comme pour y chercher son épée. Il ouvrit de grands yeux égarés, se frotta les paupières ; puis, considérant le garde, il se rappela sa situation présente.

« On se lève de grand matin au Capitole, dit-il. Que me voulez-vous ?

— Elle vous attend.

— Elle ? Qui ? demanda Montréal.

— La roue de torture ! » répliqua le soldat avec un horrible froncement de sourcils.

Le grand capitaine ne dit pas un mot. Il regarda un instant les six gens d’armes, comme pour mesurer sa force contre eux tous. Puis son ceil erra autour de la cellule. La plus grossière barre de fer aurait eu, dans ce moment-là, plus de prix à ses yeux qu’il n’en avait jamais attaché à l’acier le plus éprouvé de Milan. Il termina son examen par un soupir, jeta son manteau sur ses épaules, fit un signe d’adieu à ses frères et suivit les gardes.

Dans une salle du Capitole, tendue de cette soie prophétique, rouge de sang avec des raies blanches, siégeaient Rienzi et ses conseillers. Devant une embrasure, dans la salle, on avait tiré un rideau noir.

« Walter de Montréal, dit un petit homme au bas de la table, chevalier de l’ordre illustre de Saint-Jean de Jéruralem…

— Et capitaine de la Grande Compagnie, ajouta le prisonnier d’une voix ferme.