Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 2, 1865.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.
20
RIENZI.

pire ennemi sera en sûreté et respectée. La foule va venir ici tantôt ; nos gardes vous reconduiront en toute sûreté chez vous, ou ce palais vous servira d’asile, car je vous avertis que vos époux se sont jetés dans un grand danger, et, avant peu de jours, les rues de Rome pourront être autant de rivières de sang.

— Nous acceptons votre offre, tribun, dit la signora Frangipani, touchée, et, en dépit d’elle-même, pénétrée de respect en voyant les manières du tribun. Puis, tout en parlant, elle fléchit un genou, ramassa le mouchoir et le présenta respectueusement à Nina en disant : madame, pardonnez-moi. Seule entre toutes les personnes présentes, je vous aime plus dans vos jours de péril que dans l’éclat de votre orgueil.

— Et moi, repartit Nina, en s’appuyant avec une gracieuse confiance sur le bras de Rienzi, je réponds à cela que s’il y a péril, l’orgueil n’en est que plus nécessaire. »

Tout ce jour et toute cette nuit, tinta la grande cloche du Capitole. Mais, le lendemain, l’aurore ne vit que des attroupements faibles et clair-semés ; la fuite des barons jetait une grande crainte dans le cœur des gens du peuple, et on accablait hautement Rienzi de reproches amers pour leur avoir donné par sa clémence téméraire cette occasion de mal faire. Ce jour-là, les rumeurs continuèrent ; ceux qui murmuraient restèrent chez eux pour la plupart, ou s’assemblèrent en groupes languissants et mécontents. Le lendemain matin, même léthargie. Le tribun convoqua son conseil (une véritable assemblée représentative).

« Voulez-vous que nous marchions en avant tels que nous sommes, dit-il, avec les quelques hommes qui voudront suivre le drapeau romain ?

— Non, répondit Pandulfo, naturellement timide, mais qui, connaissant bien le caractère du peuple, était par cela même un conseiller prudent, tenons-nous tranquilles ;