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RIENZI.


CHAPITRE II.

La mascarade.

Les lecteurs intelligents ont déjà pressenti, sans que l’auteur ait eu besoin de le raconter, les événements arrivés à Rienzi, dans l’intervalle, entre son acquittement à Avignon et son retour à Rome. Lorsque l’impression faite par Nina sur la noblesse des sentiments d’Albornoz se fut effacée, il commença naturellement à regarder son hôte comme les profonds politiques de ce temps-là considéraient toujours les hommes, c’est-à-dire, comme une pièce du grand échiquier, qu’il fallait mouvoir, avancer ou sacrifier, selon qu’il convenait le mieux au dessein qu’on avait formé. Ayant atteint son but dans la reprise du territoire pontifical, la soumission de Jean de Vico, la chute et la mort du démagogue Baroncelli, le cardinal jugea qu’il n’était point à propos de rétablir à Rome, avec une aussi haute dignité, l’habile et ambitieux Rienzi. Il sentait lui-même son vaste génie pâlir devant l’audacieux romain, et il ne se faisait aucune idée du genre de politique que le nouveau sénateur pourrait adopter, une fois qu’il serait redevenu maître de Rome. Aussi, sans avoir l’air de le retenir, refusa-t-il de concourir à sa restauration. Rienzi se vit ainsi à une journée de marche de Rome, sans avoir un soldat pour se défendre en route contre les barons. Mais le ciel avait décrété qu’il n’y aurait pas un homme, si habile ou si puissant qu’il fût, qui