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RIENZI.

moustaches énormes, accordait, avec une habileté singulière, un luth qui l’avait accompagné dans toutes ses courses errantes, et transformant soudain ses notes en une mélodie guerrière, il entonna d’une voix sonore et grave le chant que voici :

ÉLOGE DE LA GRANDE COMPAGNIE.
1.

Dis-moi, beau brun des terres dorées du Midi ; dis-moi, beau blond du Nord, avec ta cotte de mailles ou ta lance étincelante ! Dis-moi, qu’allez-vous faire ainsi chevauchant ? — Nous venons des montagnes, nous venons des sombres cavernes, nous venons au travers des flots, à pas pressés, en rangs serrés, retrouver la Compagnie de Montréal. Oh ! la joyeuse, joyeuse bande, au cœur léger, à la main pesante. Vivent les Lances des Francs-Compagnons !

2.

Dis-moi, prince des châteaux forts : dis-moi, bourgeois de la ville, vous qui faites la force de l’Apulie, l’orgueil de la Romagne et l’antique renommée de la Toscane ! Pourquoi cette mine abattue ? Pourquoi cette pâleur sur vos fronts ? Quel fantôme voyez-vous donc ? — La bannière rouge de sang et la marche retentissante de la Compagnie de Montréal. Oh ! quelle vie enivrante ! oh ! quels foudres dans les combats ! Vivent les braves Lances des Francs-Compagnons !

3.

Et vous, écussons placés sur la voûte funèbre où dort la vaillance Normande, pourquoi vous agitez-vous ainsi ? Pourquoi tremblez-vous ainsi ? Quel vent balance le trophée ? — Ce n’est pas le souffle du vent qui nous fait frémir ; mais c’est que là-dessous les morts s’agitent pour