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RIENZI.

de ceux qui sont venus après toi, même celui qui maintenant donne cours ici à sa reconnaissance, est ton éternel débiteur ! À toi l’honneur d’avoir obtenu que ses travaux, si humbles qu’ils soient, trouvent des lecteurs partout où les lettres ne sont point inconnues : grâce à toi il peut prêcher dans les pays les plus lointains la morale des révolutions oubliées, et répandre dans le palais et sur la place du marché les graines fécondes qui deviendront avec le temps des fruits utiles, quand la main du semeur ne sera que poussière, et son nom peut-être oublié ! Car, hélas ! ils sont rares ceux dont les noms peuvent survivre à la tombe ; mais leurs pensées, quels qu’ils soient, sont impérissables : d’autres se les approprient, les mûrissent, les font valoir ; et des millions d’esprits inconnus, inaperçus, sont appelés à concourir ainsi à l’immortalité d’un seul. »

Le cavalier poursuivit son chemin en s’abandonnant à des réflexions bien différentes de celles que l’idée de Pétrarque évoque aujourd’hui de si loin.

Il laissa bien derrière lui le vallon ; la route devint de plus en plus indécise, jusqu’à ce qu’elle se perdit dans un bois où les rayons du soleil se jouaient dans un dédale de branches. Enfin le bois s’ouvrit sur une vaste clairière, d’où s’élevait une montée, escarpée, couronnée des ruines d’un vieux château. Le voyageur mit pied à terre, fit gravir la colline à son cheval, et, arrivé aux ruines, le laissa dans une des chambres sans toit, recouvertes seulement de longues herbes et de plantes sauvages ; de là, montant avec quelque peine un escalier étroit et dégradé, il se trouva dans une petite chambre, moins ruinée que les autres et dont la toiture et le plancher étaient encore intacts.

Étendu à terre, enveloppé de son manteau et appuyant sur sa main une tête pensive, se trouvait un homme d’une haute stature et d’un âge mûr. Il se redressa très-vivement sur son bras à l’arrivée du cavalier.