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RIENZI.

Avant qu’il eût fini, cependant, toutes les vagues de cette mer orageuse étaient apaisées. — L’orateur devait un jour sur cette même place plaider pour une plus noble vie que celles qu’il sauvait aujourd’hui, et plaider vainement !

Aussitôt que le tribun vit le moment favorable arrivé, les barons furent introduits au balcon ; en présence de milliers d’hommes haletants d’anxiété, ils s’engagèrent solennellement à soutenir le Bon État. C’est ainsi que le matin du jour qui semblait se lever sur leur exécution fut témoin de leur réconciliation avec le peuple.

La multitude se dispersa ; la plupart calmés et satisfaits, les plus clairvoyants contrariés et mécontents.

« Il n’a fait qu’irriter la fumée et attiser la flamme qu’il n’a pas eu le courage d’éteindre, » dit en grondant Cecco del Vecchio ; et la parole du forgeron, devint un proverbe et une prophétie.

Cependant, le tribun, au moins sûr en lui-même d’avoir pris le parti le plus généreux, renvoyait le conseil et se retirait dans la chambre où l’attendaient Nina et sa sœur. Ces belles jeunes femmes avaient conçu l’une pour l’autre la plus tendre affection, et la différence qui existait entre leurs caractères et leurs figures semblait, par l’effet du contraste, rehausser les charmes de toutes les deux ; de même que, dans une parure de bijoux habilement composée, la perle et le diamant se prêtent un mutuel éclat.

Comme Irène détournait alors son pâle visage et ses yeux ruisselants de larmes du sein auquel elle s’était attachée pour se soutenir, sœur timide, inquiète, agitée, en face de la fière épouse, confiante et assurée, comme si jamais elle n’eût douté des intentions ni du pouvoir de son Rienzi, ce contraste eût fourni à un peintre une digne incarnation de l’amour qui espère et de l’amour qui craint toutes choses.