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RIENZI.

partie de l’histoire. Deux sénateurs ont été nommés de concert par le pape.

— Leurs noms ?

— Bertoldo Orsini, et un des Colonna. Quelques semaines après, la cherté des subsistances a irrité l’estomac de cette misérable canaille, ils se sont soulevés, ils ont jeté les hauts cris, pris les armes, assiégé le Capitole.

— Bien ! bien ! criait la signora, joignant les mains et montrant dans le jeu de sa physionomie l’intérêt qu’elle prenait au récit.

— Colonna n’a échappé à la mort que sous un vil déguisement, Bertoldo Orsini a été lapidé.

— Lapidé !… c’est bon, en voilà toujours un.

— Oui, belle dame, un membre d’une grande famille, et dont la moindre goutte de sang vaut mieux qu’un océan de bourbe plébéienne. À présent tout n’est plus que désordre, confusion, anarchie à Rome. Les disputes des nobles ébranlent et agitent la cité jusque dans ses fondements ; princes et peuple, fatigués d’avoir tant de fois essayé d’établir un gouvernement, n’ont plus aujourd’hui d’autre loi que la crainte de l’épée. Tel est, belle dame, l’état de Rome. Ne soupirez point, nous veillons sur elle. On y remédiera, et c’est peut-être moi, madame, qui serai l’heureux instrument mis en usage pour rendre la paix à votre ville natale,

— Il n’y a qu’un moyen de rendre la paix à Rome, répliqua brusquement la signora, et c’est le rétablissement de Rienzi,

Le cardinal tressaillit : « Madame, dit-il, ai-je bien entendu ? N’êtes-vous pas noble de naissance ? Pouvez-vous désirer l’élévation d’un plébéien ? Vous parliez tout à l’heure de vengeance, et maintenant vous demandez miséricorde !

— Monseigneur le cardinal, dit sérieusement la belle signora, je ne demande point miséricorde : un tel mot