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RIENZI.


CHAPITRE II.

Portrait d’un prêtre guerrier. — Une entrevue. — Intrigues
et contre-intrigues des cours..

Gilles ou Egidio, cardinal d’Albornoz[1] était un des hommes les plus remarquables de cette époque remarquable, si prodigue en génies. Il se vantait de descendre des maisons royales d’Aragon et de Léon ; il était de bonne heure entré dans les ordres et avait obtenu, bien jeune encore, l’archevêché de Tolède. Mais aucune carrière pacifique, si brillante qu’elle fût, ne suffisait à son ambition. Il ne pouvait se contenter des honneurs de l’Église, à moins que ce ne fussent les honneurs d’une église militante. Dans la guerre contre les Maures, aucun Espagnol ne s’était distingué d’une manière plus éclatante ; et Alphonse XI, roi de Castille, avait insisté pour recevoir des mains du belliqueux ecclésiastique les insignes de la chevalerie. Après la mort d’Alphonse, qui lui était fort attaché, Albornoz se retira à Avignon, et obtint de Clément VI le chapeau de cardinal. Sa haute faveur continua auprès d’Innocent, et maintenant, comme il était cons-

  1. Voici une anecdote caractéristique sur cet ecclésiastique audacieux. Un jour, Urbain V lui demandait un compte rendu des dépenses faites dans son expédition militaire contre les tyrans italiens. Le cardinal présenta au pape une voiture remplie des clefs des villes et des forteresses qu’il avait prises. — « Voici mes comptes », dit-il, « vous voyez comment j’ai placé votre argent. » Le pape l’embrassa et ne lui en reparla plus.