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RIENZI.

s’il redoutait pour lui cette épreuve, es-tu réellement décidé à convaincre tes propres yeux et ton cœur ? c’est un spectacle qui peut t’épouvanter, et puis la contagion peut causer ta perte, si vraiment, comme il me semble, la mort n’a pas déjà écrit sur ta personne : Il est à moi !

— Corbeau de mauvais augure ! répondit Adrien, ne vois-tu pas que ce qui me fait reculer ce n’est que ta voix et ton aspect ? Montre-moi celle que je cherche, vivante ou morte.

— Je vais vous la montrer, alors, dit brusquement le Becchino, telle qu’on l’a confiée à mes soins il y a deux nuits. Les lignes et les contours de la figure sont peut-être déjà effacés, car la peste va vite en besogne, mais j’ai laissé sur elle de quoi vous faire voir que le Becchino n’est pas un menteur. Apportez ici les torches, camarades, et soulevez la porte. Pourquoi me regarder tout ébahis ; c’est l’idée du gentilhomme, et il payera bien. »

Adrien suivit machinalement ses guides ; il détourna à droite : là, un spectacle dont la cruelle philosophie écrase comme sous une meule tout l’orgueil des mortels, attendait ses regards, le spectacle de ce caveau où la terre dévore tout ce qui sur la terre était florissant, joyeux, triomphant !

Les Becchini levèrent une pesante grille, baissèrent leurs torches (à peine nécessaires, car à travers l’ouverture béante se précipitaient, avec une hideuse splendeur, les rayons d’un soleil brûlant) et firent signe à Adrien d’avancer debout sur le sommet de l’abîme : il regarda au-dessous de lui............................ .............................

C’était une place large, profonde et circulaire, semblable au fond d’un puits sans eau. Dans des niches creusées au milieu des parois à l’entour, gisaient, chacune dans leur bière, les premières victimes de la peste, du