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RIENZI.

torches, vint d’une façon inattendue à leur rencontre. C’était la suite de l’évêque d’Orvieto, revenant du palais de Martino di Porto, et se dirigeant, accompagné de Rienzi, sur celui d’Adrien. Ils avaient appris au premier de ces deux palais, sans avoir d’entrevue avec les Orsini, mais seulement de la bouche des gardes restés en bas dans la cour, l’issue du conflit et le nom du champion d’Irène ; et, en dépit de la réputation de galanterie attribuée généralement à Adrien, Rienzi connaissait assez son caractère et la noblesse de son naturel pour se sentir certain qu’Irène, sous sa protection, était en toute sûreté. Hélas ! c’est dans cette sûreté même que le cœur, souvent, trouve le plus de danger. Jamais l’amour n’est si périlleux pour la femme que lorsque l’homme qui l’aime, sait pour l’amour d’elle, se vaincre lui-même.

Pressant de sa douce étreinte la poitrine de son frère, Irène lui dit de remercier son libérateur ; et Rienzi, avec cette franchise qui fascine, qui sied si bien aux gens ordinairement réservés, et que tous les hommes désireux de gouverner les cœurs de leurs semblables doivent parfois maîtriser, Rienzi s’avança vers le jeune Colonna, et versa dans son cœur sa reconnaissance et ses louanges.

« Nous avons été séparés trop longtemps, il nous faut refaire connaissance, répliqua Adrien. Je viendrai te voir, sous peu, sois-en sûr. »

Puis, se tournant pour prendre congé d’Irène, il porta sa main à ses lèvres, et en la pressant, quand elle échappa à son étreinte, se trompa-t-il, en pensant que ces doigts délicats lui rendaient la pression légèrement, sans le vouloir ?