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RIENZI.

— Pourquoi tant d’empressement à me quitter ? répliqua tristement Adrien. Hélas ! quand mes yeux ne te verront plus, il me semblera que la lune a disparu de l’horizon de la nuit. Mais c’est un bonheur que d’obéir à tes souhaits, même quand ils t’arrachent à ma présence. »

Un léger sourire sépara les lèvres d’Irène, et Adrien entendit battre son cœur lorsqu’il tira de ce sourire et de ces yeux baissés un présage qui ne lui était point défavorable.

Ce fut avec répugnance et lentement qu’il se retourna vers la porte pour appeler les gens de sa suite. « Mais, dit-il, en les voyant réunis sur le pompeux escalier, tu dis, belle dame, que le nom de ton frère ne m’est pas inconnu. Dieu veuille que ce soit vraiment un ami des Colonna !

— Sa gloire, répondit Irène d’une manière évasive, la gloire de Cola de Rienzi, c’est d’être l’ami de tous les amis de Rome.

— Sainte Vierge d’Ara Cœli ! Tu as pour frère cet homme extraordinaire ? s’écria Adrien, en prévoyant, à l’annonce de ce nom, une barrière à sa subite passion. Hélas ! il n’en saura aucun gré à un Colonna, à un noble, et cela, bien que ton heureux libérateur, douce fille, ait cherché de bonne heure à être son ami.

— Tu montres à son égard une grande injustice, monseigneur, répliqua vivement Irène ; c’est un homme capable, plus que tout autre, de sympathiser avec ta généreuse valeur, quand même tu l’aurais déployée pour la défense de la plus humble Romaine ; à plus forte raison lorsque c’était pour protéger sa sœur !

— En vérité, nous sommes en un temps d’affliction, repartit Adrien d’un ton pensif, lorsqu’ils furent en pleine rue ! quel malheur en effet quand des hommes également peinés des maux de leur patrie sont pourtant soupçonneux l’un pour l’autre ; quand il suffit d’être patricien pour que