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RIENZI.

parole envoyait rançonner la terre par des génies pour la faire décorer par des fées, car ce n’était pas là le faste grossier d’une reine terrestre. Derrière les coussins empilés sur lesquels se couchait à demi Nina, se tenaient quatre filles, belles comme des nymphes, avec des éventails composés des plumes les plus rares, et à ses pieds reposait une femme plus âgée que les autres, dont le luth, maintenant silencieux, attestait son occupation officielle.

Mais la chambre par elle-même eût-elle paru un peu trop fantastique et surchargée d’ornements prodigués, la tournure et les traits de Nina auraient justifié tout cela d’un seul coup, tant elle semblait complétement le génie naturel du lieu ; tant sa beauté, exaltée par un amour satisfait, par une vanité flattée, par une espérance triomphante, était une incarnation admirable de la plus brillante vision qui jamais flotta devant les yeux du Tasse, quand il forma son immortelle Armide de la puissance glorieuse de l’enchanteresse unie aux charmes de la femme.

Nina se leva à demi en voyant Ursule, dont les traits calmes et tristes exprimaient involontairement la surprise et le saisissement que lui inspirait une amabilité si rare et si frappante, mais qui, un moment éblouie de la splendeur environnante, reprit bientôt son sang-froid ordinaire, et s’assit sur le coussin qui lui fut désigné, pendant que le jeune visiteur demeurait debout et la langue enchaînée par une admiration enfantine, au centre de l’appartement. Nina le reconnut et sourit.

« Ah ! voilà le joli garçon, dont l’œil vif et l’air hardi ont gagné mon caprice hier ! Êtes-vous venue pour accepter mon offre ? Est-ce à vous, madame, qu’appartient ce bel enfant ?

— Signora, répliqua Ursule, je vous dirai sans détours que, par une suite d’événements dont je veux vous épar-