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RIENZI.

— Il se porte comme le plus jeune d’entre nous, répondit Adrien.

— Les derniers événements ont dû le contrarier un peu, fit Montréal avec un malin sourire. Ah ! vous prenez un air sérieux. Voyons, vous reconnaissez du moins ma prévoyance. J’ai été le premier à prédire à votre parent l’élévation de Cola de Rienzi ; il m’a tout l’air d’un grand homme, et jamais il ne s’est montré plus grand qu’en conciliant les Colonna et les Orsini.

— Le tribun, répliqua Adrien d’une manière évasive, est certainement un homme d’un génie extraordinaire. Et maintenant, en le voyant gouverner, je m’étonne seulement d’une chose, c’est qu’il ait jamais pu se résigner à obéir ; la majesté semble son essence.

— Quand on parvient au pouvoir, on endosse aisément le harnais du pouvoir, la dignité, répondit Montréal ; et si ce que j’entends dire est vrai (faites-moi raison à la santé de votre dame), le tribun, sans être lui-même de haute naissance, s’unira bientôt à une haute famille.

— Il est déjà marié à une Raselli ; c’est une vieille maison de Rome.

— Vous prenez un faux-fuyant. Le doulx soupir ! Le doulx soupir ! pour me servir des termes du vieux Cabestan, dit en riant Montréal. Allons, vous m’avez fait raison d’une coupe pour votre dame, videz-en une autre à la santé de la belle Irène, la sœur du tribun, pourvu pourtant que les deux ne fassent pas une seule personne. Vous souriez et secouez la tête ?

— Je ne vous dissimule point, sire chevalier, répondit Adrien, qu’une fois ma présente mission remplie, je suis sûr qu’une alliance entre le tribun et un Colonna favorisera beaucoup nos intérêts réciproques.

— On ne m’avait donc point trompé, dit Montréal d’un ton grave et pensif ; il faut vraiment que le pouvoir de Rienzi soit bien grand.