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RIENZI.

de fait, le jeune Colonna était déjà de mauvaise humeur contre lui-même d’avoir été obligé d’écarter par un refus discret et poli la proposition de Montréal ; il était encore piqué de la manière méprisante dont le Provençal avait parlé de la chevalerie romaine, et d’un certain ton de supériorité que Montréal avait pris à son égard toutes les fois qu’il s’agissait de questions militaires ; il sentait donc en ce moment sa joue s’enflammer et sa lèvre trembler. D’une haute habileté dans la science de la guerre pour son temps, il avait un désir naturel et excusable de prouver qu’au moins il n’était pas un adversaire indigne même de la meilleure lance d’Italie ; de plus, la galanterie de ce temps-là lui faisait regarder comme une trahison envers sa maîtresse de ne pas saisir la première occasion de proclamer ses perfections.

C’était donc avec un mouvement d’irritation marqué qu’Adrien, arrivé en vue du pavillon de Montréal, aperçut l’écuyer qui revenait à lui. Le lecteur jugera s’il n’avait pas raison lorsque celui-ci, descendant encore une fois de cheval, l’accosta ainsi :

« Mon maître, le chevalier de Saint-Jean, en entendant la courtoise réponse du seigneur Adrien de Castello, me charge de lui dire que, si la conversation plus sérieuse à laquelle le seigneur Adrien fait allusion, est de nature à gâter l’aimable divertissement qu’il lui propose, il prend la liberté respectueuse de lui offrir le carrousel avant l’entretien. Le gazon, devant la tente, est si doux et si uni que même une chute de cheval n’entraînerait aucun danger ni pour le cavalier, ni pour son coursier.

— Par notre dame ! s’écrièrent d’un même souffle Adrien et Annibaldi, voilà des paroles qui ne sont plus si courtoises !

— Eh bien ! (continua Adrien après avoir repris son sang-froid), puisque ton maître veut se passer cette fan-