Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/222

Cette page a été validée par deux contributeurs.
218
RIENZI.

« Eh bien, mes amis ! ajouta-t-il en voyant la foule, à ces mots, se serrer davantage autour du messager, croyez-vous que moi, qui ai des rois pour compagnons, j’irais faire une victime d’un adolescent sans armes ? Fi ! faites place ! place ! Jeune homme, suivez-moi à la maison ; vous êtes en sûreté dans mon château comme dans les bras de votre mère. » Ainsi parlant, Montréal, avec beaucoup de dignité, de résolution et de gravité, chevaucha lentement vers son château, tandis que ses soldats s’étonnaient à quelque distance, et que le messager à la robe blanche le suivait avec la multitude qui refusa de se séparer de lui : tel était son enthousiasme, qu’elle monta même jusqu’aux portes du château redouté, et s’obstina à attendre au dehors jusqu’à ce que le retour du jeune homme les rassurât sur son salut. Montréal, bien que sans loi partout ailleurs, respectait strictement, dans son voisinage immédiat, les droits du dernier paysan, et affectait même de se rendre populaire avec les pauvres ; il fit entrer la foule dans la cour, ordonna à ses serviteurs de leur fournir du vin et des rafraîchissements, régala les bons moines en sa grande salle, puis il passa le premier dans un petit cabinet où il reçut le messager.

— Voici qui vous expliquera mieux que je ne pourrais le faire l’objet de ma mission » dit le jeune homme en présentant une lettre à Montréal.

Le chevalier coupa le ruban de soie avec son poignard et lut l’épître avec beaucoup de calme apparent.

« Notre tribun, dit-il après avoir terminé cette lecture, n’a pas été long à apprendre le style laconique du pouvoir. Il m’ordonne de rendre ce château et d’évacuer sous dix jours le territoire du pape. Bien obligé : il me faut le temps de respirer, de réfléchir à cette proposition ; asseyez-vous, je vous prie, jeune sire. Excusez, mais j’aurais pensé que votre maître avait assez à démêler