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RIENZI.

grie, et, plongé dans de nouveaux projets, abandonnait volontiers pour le moment tous ses desseins sur Rome. Pourtant il pensait que ses prétentions plus augustes n’étaient qu’ajournées ; et il voyait toujours briller à l’horizon de son aventureuse carrière, le Capitole de Rome et le sceptre des Césars.

Un jour, Montréal, escorté d’une faible troupe, passait à cheval près des murs de Terracine, quand tout à coup les portes s’ouvrirent à deux battants, et une foule nombreuse en sortit, précédée d’une figure singulière, dont elle suivait les pas tête nue, appelant à haute voix les bénédictions du ciel ; un cortége de moines fermait la procession, chantant un hymne dont voici à peu près la fin.

« Comme il est beau sur les montagnes, voyez, celui dont les pieds apportent avec joie de joyeuses nouvelles ! Les fleurs naissent le long de son sentier, et des voix, entendues au ciel, chantent accompagnées de harpes angéliques ; la lutte et le carnage cessent devant ton passage béni, jeune messager de paix ! Franchissant les montagnes, traversant les marais, tes pieds sacrés glissent toujours d’un pas assuré. Jour et nuit tu ne connais point de crainte. Tu marches, solitaire, mais avec Dieu. Où la rage des païens est la plus cruelle, tu perces au travers de la multitude armée. Pour cotte de mailles, tu portes une robe blanche sans tache. Au lieu de l’épée meurtrière, brille dans ta main la baguette d’argent. Au travers des camps, au travers des cours, au travers de la sombre forteresse du bandit, la mission de la colombe emporte le ministre d’amour ; d’un mot il apprivoise les plus féroces et réclame le monde au nom du Christ ; et cependant, comme autrefois les eaux s’ouvrirent sous les pas de ton Dieu, la guerre, la colère et la rapine, s’arrêtent et se taisent autour de ta route charmée, ô messager de paix ! »