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RIENZI.

Quelque répugnance qu’inspirât ce discours à Rienzi, il dissimula à dessein.

« Certes, dit-il, je nierais vainement, renommé capitaine, que mon seul but soit le pouvoir dont vous parlez. Mais quelle alliance peut-il y avoir entre l’ambition d’un citoyen romain et celle d’un chef d’armées mercenaires, qui ne choisissent leur cause que d’après leur solde, combattant aujourd’hui à Florence pour la liberté, demain à Bologne pour la tyrannie ? Pardonne ma franchise ; car en ce siècle on ne trouve rien de déshonorant dans ce que j’impute à vos armées. La vaillance et les qualités du général sont censées consacrer toute cause qu’elles illustrent ; et celui qui est le maître des princes peut bien être honoré par eux comme leur égal.

— Voilà que nous entrons dans un quartier de la ville moins désert, dit le chevalier, n’y a-t-il pas quelque endroit secret, l’Aventin par exemple, où nous puissions conférer ?

— Chut ! répliqua Rienzi en regardant tout autour de lui avec précaution. Je te remercie de l’avis, noble Montréal, il ne faut pas qu’on nous voie ensemble ; si tu voulais bien me suivre chez moi, par le pont Palatin[1] ? Nous y pourrions causer à notre aise et en toute sécurité.

— Soit, dit Montréal, restant en arrière. »

À pas rapides et précipités, Rienzi traversa la ville, où, sitôt qu’on le reconnaissait, les citoyens, çà et là, le saluaient avec un respect marqué ; puis tournant dans un labyrinthe d’allées obscures, comme pour éviter les voies plus fréquentées, il arriva enfin à une large place,

  1. Les ruines pittoresques que l’on montre aujourd’hui comme la demeure du célèbre Cola de Rienzi ont été longtemps attribuées par les antiquaires à un autre Cola ou Nicola. Je crois cependant que la question a été récemment décidée ; et vraiment il fallait un antiquaire, et un Romain encore, pour supposer qu’il y eût deux Cola à qui l’inscription de la maison pût s’appliquer.