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RIENZI.

envie. Dans dix jours, à partir de cette heure, révérend père, je lèverai quarante hommes d’armes à cheval, prêts à obéir à tout ordre donné d’un commun accord pour la sécurité des États-Romains. Et vous, citoyens, bannissez, je vous prie, de votre pensée, ces éloquentes invectives qu’on vous a récemment fait entendre contre vos concitoyens. Nous tous, n’importe de quel rang, nous pouvons avoir pris part aux excès de ce siècle malheureux ; au lieu de venger et d’imiter, ne songeons qu’à réformer, à unir ; puisse le peuple voir, à partir de ce jour, que la vraie gloire d’un patricien, c’est que son pouvoir le met à même de mieux servir son pays !

— Belles paroles ! fit le forgeron, en ricanant.

— S’ils étaient tous comme lui ! dit le voisin du forgeron.

— Il a tiré les nobles d’un grand embarras, dit Pandolfo.

— Voilà une jeune tête qui a montré la sagesse d’un vieillard, dit un vieux Malatesta.

— Vous avez détourné le flot, mais non refoulé la marée, noble Adrien, chuchota Montréal, l’homme aux augures sinistres, lorsque, au milieu des murmures d’une approbation générale, le jeune Colonna vint se rasseoir.

— Que voulez-vous dire ? demanda Adrien.

— Que vos douces paroles, comme toutes les conciliations des patriciens, sont venues trop tard. »

Aucun autre noble ne bougea, bien qu’ils se sentissent peut-être disposés à se joindre à ce sentiment général de pardon et d’amnistie, et qu’ils semblassent par signes et par chuchotements applaudir au discours d’Adrien. Ils étaient trop endurcis dans l’inflexible rudesse d’un ignorant orgueil pour se plier à adresser un langage conciliant, soit au peuple, soit à leurs ennemis. Raimond, jetant un coup d’œil à la ronde, et craignant que leur